Cérémonie d’ouverture des JOP 2024 : hommage aux métiers d’art
Date de publication :
28/7/2024
Le vendredi 26 juillet 2024, le monde entier a eu les yeux rivés sur Paris pour l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024. Thomas Jolly, directeur artistique de cet événement grandiose, a orchestré une cérémonie d'ouverture spectaculaire, transformant la Seine en une scène vivante et mettant en lumière l'histoire, la culture et les savoir-faire français. Au cours de ses douze tableaux thématiques, cette cérémonie a également offert une opportunité unique de valoriser les métiers d’art, un secteur clé de l’économie et de la culture française.
La Maison Dior et la Maison Février, plumassiers, ont apporté leur contribution significative à la cérémonie en habillant Lady Gaga et ses danseurs pour l’interprétation de "Mon truc en plumes", en hommage à Zizi Jeanmaire. Cette scène a initié la valorisation des métiers d’art, en particulier la couture et la broderie, des domaines dans lesquels la France a une réputation mondiale. Peu après, les costumes ornés de plumes dorées brodées une à une à la main par les artisans de la maison Lemarié pour Aya Nakamura et ses danseuses et danseurs ont illustré l’art de la haute couture française.
Dior a également habillé Axelle Saint-Cirel pour une interprétation de La Marseillaise sur le toit du Grand Palais. La robe spectaculaire, utilisant le drapeau français comme inspiration, a démontré l'expertise des artisans en drapage et en confection de haute facture.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
Parmi les tableaux les plus marquants, il y a eu celui intitulé "Synchronicité". Daphné Bürki l’a dit : cette parenthèse qui rend hommage à l’artisan qui fait tourner le pays. Il a débuté avec une vue emblématique de Notre-Dame de Paris, un symbole puissant de résilience et de renouveau. Cette scène a non seulement rendu hommage aux artisans qui ont travaillé sans relâche à la restauration de la cathédrale depuis l'incendie de 2019, mais elle a également mis en avant les métiers d’art de manière très concrète. Le son des marteaux et des outils utilisés dans la restauration a été intégré dans la bande sonore, composée par Victor le Masne, créant ainsi une symphonie unique qui célébrait le travail des artisans. La présence de ces danseurs sur les échafaudages réalisant des acrobaties a illustré la technicité et la prouesse quotidienne de nos artisans.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
La scène suivante a introduit les médailles olympiques, frappées à la Monnaie de Paris, avec une mise en scène qui a commencé sur les toits du siège social de Louis Vuitton au Pont Neuf. Ce tableau a souligné l'importance de l'artisanat dans la fabrication des médailles et a illustré la collaboration entre l’art et le luxe, un domaine où la France excelle. Louis Vuitton, un partenaire clé de Paris 2024, a utilisé cette opportunité pour montrer ses malles iconiques, utilisées pour protéger et présenter les médailles.
Cette scène a également montré comment l’artisanat d’art s’intègre dans les industries modernes et de luxe, représentant une fusion parfaite entre tradition et innovation.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
Et puis il y a eu cet instant, important, court mais significatif : Daphné Bürki a cité les noms de Jeanne Friot et Robert Mercier, “j’en profite pour dire que ce costume a été dessiné par une femme créatrice, c’est suffisamment rare pour le dire. Elle s’appelle Jeanne Friot. En collaboration avec un virtuose, Robert Mercier” . Des mots qui ont un fort sens dans un écosystème qui les invisibilise.
Leur contribution exceptionnelle à cet événement mondial dans la création de la tenue de la déesse Sequana en armure. Cette tenue a captivé le public lors de la cérémonie d'ouverture des JO de Paris 2024. Faite de ceintures en cuir imbriquées, elle symbolisait la convergence de l'artisanat traditionnel et de la créativité contemporaine.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
A 29 ans, Jeanne Friot est une créatrice renommée du prêt-à-porter français, habillant des célébrités telles que Madonna. Sa collaboration avec Mercier a permis de réaliser une pièce complexe, alliant esthétique et fonctionnalité, incarnant la force et la résilience de la déesse Sequana.
Robert Mercier, artisan du cuir ayant collaboré avec de grandes maisons comme Jean Paul Gaultier, Maison Margiela, Balmain, Schiaparelli, et Mugler, est reconnu pour ses créations virales et son expertise exceptionnelle en cuir. Réputé pour sa capacité à dialoguer avec la matière, développant des techniques innovantes pour créer des pièces uniques il a réalisé des œuvres emblématiques, comme le corps de femme moulé en cuir pour Jean Paul Gaultier, des bustiers musclés pour Schiaparelli, et la robe "wet-look" en cuir pour Zendaya à la Mostra de Venise. Sa maîtrise technique permet de transformer le cuir en objets d'art aux apparences variées, comme des cols en porcelaine ou des bustiers chromés pour Beyoncé.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
Lors de la création de l'armure de Sequana, Mercier a appliqué son expertise en assemblant minutieusement les ceintures en cuir pour former une texture complexe et robuste, tout en assurant confort et mobilité. Ce travail a non seulement démontré l'excellence en maroquinerie et en couture, mais a aussi illustré comment l'innovation et la tradition peuvent se combiner pour créer des œuvres marquantes. L'armure a été unanimement saluée pour son originalité, sa complexité technique et son message puissant, célébrant, à nouveau, l'artisanat d'art français.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
L’Atelier Blam, une entreprise nantaise de design et d’architecture, a également joué un rôle clé dans la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 en réalisant deux des pièces emblématiques de l'événement : le cheval métallique et la vasque olympique.
Le cheval articulé, qui a "galopé" sur la Seine, incarnant la déesse Sequana, a captivé les spectateurs par sa grâce et sa technicité. Conçue presque entièrement en aluminium, un matériau privilégié pour sa légèreté, cette œuvre a nécessité un an de travail minutieux, mobilisant plusieurs centaines de sous-traitants. L'assemblage des différentes pièces du cheval a été réalisé avec une précision horlogère, impliquant des techniques d'ingénierie avancées pour garantir à la fois la solidité et la fluidité des mouvements. Le cheval repose sur un système de flottaison motorisé en forme de trimaran, conçu pour assurer une stabilité parfaite tout en restant discret, créant ainsi l'illusion que la monture galopait sur l'eau. Ce système, testé dans la baie de Quiberon, a été développé en partenariat avec les chantiers navals MMProcess, spécialistes de l’ingénierie maritime. Symbole durable du savoir-faire et de l’innovation technique de cette entreprise, le cheval sera exposé à La Maison Sanofi à Paris à partir d’octobre 2024,
Parallèlement, l’Atelier Blam a aussi été choisi pour réaliser la vasque olympique, en collaboration avec EDF et le designer Mathieu Lehanneur, lauréat du prix de la Fondation Bettencourt-Schueller. Cette vasque, prouesse d’ingénierie abritant une flamme électrique décarbonée, incarne la fusion entre tradition et modernité, illustrant à merveille l’expertise de l’Atelier Blam, déjà reconnu mondialement pour ses collaborations avec de grands designers et marques de luxe. Ces réalisations pour Paris 2024 ne feront qu’accroître sa renommée internationale.
Avec plus de 60 000 entreprises et 150 000 professionnels, les métiers d'art représentent une force économique considérable en France. En 2019, ils ont généré un chiffre d'affaires de 19 milliards d'euros, dont 8 milliards provenant des exportations. Cependant, cette contribution économique significative est souvent sous-estimée et sous-valorisée. La cérémonie d'ouverture a été une occasion de rappeler l'importance économique et culturelle de ces métiers, mais il reste beaucoup à faire pour assurer leur soutien et leur développement durable.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
La cérémonie d'ouverture a brillamment mis en lumière les métiers d'art, soulignant leur importance et réjouissant de nombreux spectateurs. Cependant, il est crucial de s'attarder sur les lacunes persistantes dans la reconnaissance institutionnelle de ces professions. Malgré le rôle central que jouent les artisans dans l'industrie française, ils restent largement méconnus. En effet, les codes NAF ne sont pas adaptés aux métiers d'art, rendant ces professionnels difficilement identifiables et les privant ainsi d'un accès aux aides et de la possibilité de produire des statistiques concrètes et pertinentes. Ce constat est d'autant plus regrettable que l'Institut pour les Savoir-Faire Français (anciennement INMA) a déjà réalisé une grande partie de ce travail. Cette problématique se manifeste également dans des projets publics tels que la restauration de Notre-Dame de Paris, où la mention des ateliers impliqués fait encore défaut.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
Le plan stratégique en faveur des métiers d'art, lancé par le gouvernement français en mai 2023 sous l'impulsion de la ministre Rima Abdul-Malak, reconnaît l'importance de la transmission des savoir-faire et de leur structuration. Cependant, l'instabilité politique avec la nouvelle assemblée de juin 2024 met en péril la mise en œuvre de ce plan. Malgré l'annonce prometteuse de l'année précédente, aucune avancée notable n'a été réalisée depuis. Pour garantir l'efficacité de ce plan, il est crucial de résoudre en priorité les problèmes de reconnaissance et de classification administrative des métiers d'art, permettant ainsi une meilleure valorisation et un soutien accru à ces professions essentielles à la culture et à l'économie française.
Cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 - Crédits France 2
La cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024 a magnifiquement célébré les métiers d’art, mettant en lumière leur contribution vitale à l’histoire et à la culture françaises. À travers des tableaux impressionnants, tels que celui de Notre-Dame de Paris et la présentation des médailles olympiques, l’événement a illustré la fusion parfaite entre tradition et innovation. Cependant, malgré cette reconnaissance publique, les métiers d’art continuent de faire face à des défis significatifs en termes de reconnaissance institutionnelle et de soutien économique. Pour pérenniser et valoriser ces savoir-faire, il est essentiel de mettre en œuvre des stratégies nationales robustes et adaptées, assurant ainsi leur développement durable et leur juste place dans l’économie et la culture françaises. Nous espérons fortement qu’un événement comme celui-ci soit annonciateur d’un renouveau en termes de reconnaissance.